Habituellement, je passe sous silence les premières parties nases parce que dans la vie il faut être sympa, ouvert d’esprit et grave tolérant. Mais quand on te sert Arlt., duo déprimant et mixte constitué d’un gars et une fille aussi drôles que des amishs à l’enterrement de leur grand-tante, débitant une litanie de textes plats à mi-chemin entre un film de Bergman et une face B de Delerme1, qu’on t’en remet une louche avec Josephine Foster, sorte d’égérie hurlante et ultra-sonique n’en finissant pas de finir et quittant la scène vingt minutes en retard au son du plus gros soupir de soulagement collectif qu’il m’ait été donné d’entendre depuis l’annonce du split de Pleymo, que tout ça se déroule sans aucun bruit au point que pour pouvoir rire du truc tranquilles, Copain, Copain et toi êtes obligés de sortir de la salle, pardon mais on est en droit de persifler sur le Internet mondial dès le lendemain matin à grands coups de blagues débiles du genre « non mais Joséphine, faut s’taire » ou « quittes à choisir un artiste à nom de bière, mieux vaut écouter Eugene McGuinness, » voire « on leur a dit “Minimum Festival” et ils ont compris “Minimum de décibels”. C’est balot. »
Enfin. L’avantage avec de telles premières parties, c’est qu’ensuite la tête d’affiche est certaine de trouver une salle vraiment motivée pour les voir. Les autres sont partis ou pendus. I Am Kloot assure un show rêche et chaleureux, simpliste et sincère, qui console l’assistance encore sous le coup des comiques qui ont précédé. John Bramwell, avec son format Malzieu et ses sourcils Gallagher, attire tous les regards sans en faire des tonnes, juste avec sa voix désabusée et haut perchée jetée au-dessus d’une guitare presque trop grande pour lui, le pied posé sur un casier de bouteilles. Bien sûr il y a quelques passages à vide, tant il est difficile de faire dans le calme sans y perdre de sa superbe, mais des Cuckoo, des Twist, des Gods and Monsters et des Astray sont autant de marches montant vers le Proof final, décidément leur plus beau moment de grâce avant le rappel. Certaines prestations se méritent, certaines choses ne s’atteignent pas facilement, certaines atmosphères calmes peuvent même demander beaucoup d’énergie… et ces Anglais-là l’ont bien compris. Kloot, oui, mais tout sauf couillons.
I Am Kloot – Life in a Day (Peel Session)
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1 Du « Folk francais psychorigide d’éternels étudiants en Science Humaine, devant 12 fans en extase, » me glisse Copain à l’instant par mail. Comme c’est bien vu.