Quand on voit ça, on en demanderait presque l’asile politique en Irlande. Déjà que ces gens-là savent faire de la musique, mais en plus, la bière qu’on peut y boire est des meilleures. Damien Rice, sachant que niveau bière, Détroit c’est pas ça, se venge sur la musique. Pendant presque deux heures, c’est sa vie qui coule sous nos yeux et dans nos oreilles. Damien introduit ses chansons avec des anecdotes. Il s’arrête en plein milieu pour expliquer pourquoi il a écrit telle phrase. Un peu plus loin, il fait taire les deux filles qui discutent au fond de la salle. Il faut dire que l’atmosphère est tellement religieuse qu’on se sent obligé de commander sa bière en chuchotant dans l’oreille du barman.
Autour de Damien Rice, on trouve plus qu’un groupe. On dirait une troupe de théâtre. Chaque chanson est une scène de vie, les gens vont et viennent sur les planches pour jouer ou retourner backstage. Ici, c’est Rice tout seul qui nous chante Hallelujah. Là, c’est Vyvienne qui reprend Seven Nation Army sur son violoncelle. The Frames, la première partie dont je n’ai vu que les deux dernières chansons — ce qui craint à mort, parce que ce groupe vaut vraiment le détour — sont de la partie. Colm MacConIomaire (violon) et Glen Hansard (chant) se joignent au chanteur sur quelques titres.
En parfait maître de cérémonie, Rice se livre à nous à travers ses chansons. Il veut que son show soit le plus vivant possible et applique le concept à ses titres. Il les étire, les triture, les fait évoluer, comme des êtres vivants. Cold Water est allongée à l’infini. Volcano dure un quart d’heure. À la fin, le chanteur est en nage quand les lumières s’allument toutes grandes. On sent qu’il a tout donné. Qu’il vient de vivre une vie entière pendant ce concert.
Ce style de soirée, ça marque. Un mec qui t’ouvre son cœur à ce point, c’est un mec qui t’aime. Et tu peux pas oublier comme ça un mec qui t’aime. Ça serait pas sympa. Résultat, Damien Rice est mon coloc’ imaginaire depuis deux jours. Plutôt inquiétant. Va falloir consulter.